Des femmes peintres
janvier 2016
Pour beaucoup d’entre nous, l’exposition “ Vigée-Lebrun” à Paris a donné l’occasion de découvrir une peintre célèbre en son temps, mais occultée depuis par ses prestigieux homologues masculins. Elle partage en ceci le sort de bien d’autres (Sofonisba Anguissola, Artemisia Gentileschi, Adélaïde Labille-Guiard, ...), à qui Martine Lacas rend merveilleusement justice dans son dernier livre, grâce à des reproductions alléchantes (on souhaite de nouvelles expositions, la plupart des tableaux étant très dispersés) et grâce au récit de l’habileté et du courage de ces femmes à s’imposer. Cependant un des grands intérêts de ce travail est de montrer que cette histoire est le reflet d’un des fondements de la domination des hommes sur les femmes : la partition tracée entre les natures supposées des uns et des autres. Sommairement on trouve d’un côté, la vigueur, la mesure et la création, symbolisées dans l’image occidentale par la prépondérance du dessin, de l’autre, l’émotion, l’attendrissement et la soumission, du ressort de la couleur. Comment ne pas rapprocher cela des débats actuels sur le “cure” (la technique instrumentale) et le “care” (la sollicitude s’exerçant d’abord dans le domaine de l’intime et du domestique) ? La revendication d’être “peintre”, tout simplement, fait singulièrement écho à la nécessité de ne pas séparer les deux faces du soin.
Martine Lacas. Des femmes peintres. Du XVe à l’aube du XIXe siècle. Seuil, 2015. 224 pages, 45 euros.
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